Mon enfance se déroula dans une famille dysfonctionnelle, maltraitante. Nos soirées étaient rythmées au grès des humeurs de mon père malade alcoolique. Après s’être défoulé sur nous, il avait une phase dépressive qui se traduisait par une mise en place de la préparation de sa tentative de suicide.
Pour dédramatiser ce que l’on vivait, notre mère nous disait, qu’il faisait cela pour qu’on le plaigne et qu’on l’excuse de tout ce qu’il nous faisait subir. Étant la benjamine de cette fratrie de 7 enfants et, comme vous pouvez l’imaginer, pas vraiment souhaitée, j’étais moi même, très ”copine” avec la mort. Elle me donnait une porte de sortie à toutes mes souffrances.
Je vivais avec elle, ou plutôt la mort vivait auprès de moi. Elle me rassurait, elle me rendait, si je peux le dire ainsi: » invincible”. Une porte de sortie que je pouvais ouvrir à tout moment. Pendant ces années infernales et invivables, je ne voulais pas ressembler à mon père suicidaire, cela m’a longtemps protégé du « passage à l’acte ».
N’en pouvant plus, à 15 ans, je fis ma première tentative de suicide. Ma mère pleurait et me disait : ” Si tu LE fais, tu va me faire mourir”, j’étais piégée. Je voulais bien mourir, mais je ne voulais pas faire mourir ma mère, qui, en plus de tout cela, m’avait aussi surnommée : « Son bâton de vieillesse« . Je me suis promise, d’attendre et de mourir avec ma mère.
Tant bien que mal, j’ai passé mon temps à apprendre à vivre. Comme un apprentissage de la natation, avec des hauts et bas. On boit la tasse puis on respire. On apprend les bons gestes pour se maintenir en vie. Flotter à la surface en laissant passer les vagues. Après 4 autres tentatives de suicide, que j’ai tu à ma mère, j’ai consulté un psychiatre hypnotiseur.
Nous avons travaillé ensemble. J’ose dire : » travaillé ensemble”, bien des fois j’ai voulu le quitter, je n’étais pas d’accord avec ce qu’il me disait, mais je revenais tout de même à ses consultations. Lui et mon courageux ont réussi à faire émerger la vie profondément moi. Pour lui, mon goût de vivre, est arrivé 6 mois avant la mort de ma mère, j’avais 47 ans.
J’ai pu l’accompagner et la laisser partir en paix, en lui donnant l’autorisation de mourir. Aujourd’hui j’ai 63 ans, et je suis convaincue que mes cellules du fœtus, qui me définissent aujourd’hui, avaient une telle envie de vivre et vivre heureuse. L’hypnose a été le révélateur de ma grande envie de vivre, me remplissant de joie et de gratitude.
Merci pour avoir pris le temps de lire mon expérience. Je vous embrasse tous.
Sylvaine Biet